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Madagascar : la démocratie sous Ravalomanana

Un sénateur et deux députés Tim "élus" en 2007 et 2008 avec (tiens, tiens), Niels Marquardt, l'ambassadeur américain qui a dégringolé au rang de consul, quelque part en Australie. C'est lui l'auteur des faux rapports concernant un "coup d'état". Or, il était présent au palais d'Etat d'Iavoloha, le matin du 17 mars 2009, au moment où Ravalomanana a transmis de manière anticonstitutionnelle, ses pouvoirs à un directoire militaire. Bel exemple de démocratie, n'est-il pas ?

Ce dossier fait suite à celui dédié à Eric W(r)ong et son fameux « retour de la démocratie ». Il faut savoir que les élections législatives du 23 septembre 2007 ont eu lieu à la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale, prononcée par le président Marc Ravalomanana, le 25 juillet 2007. Le nombre de députés a été réduit à 127 pour 160 auparavant.

Ci-après, l'ambiance « démocratique » de cette époque encore proche. On ne peut pas effacer l'Histoire politique authentique d'un pays avec des sites et des blogs à la gloire d'un dictateur démissionnaire et fuyard. Les U.S.A. voudraient donc que les Malgaches revivent cette « démocratie » ? Non, merci.

Jeannot Ramambazafy

Le sacre d’une République monochrome

100% une performance inégalée

La monotonie réalisée, les élections se suivent et se ressemblent par leur résultat signant une victoire écrasante du Tim et par leur déroulement puisqu’elles sortent du même moule, un code électoral adapté pour la circonstance.

Qu’importe la saveur de ces succès qui se répètent, tous les goûts sont dans la nature, il est permis d’accorder une préférence à du réchauffé, certains ont aussi le droit de savourer les victoires sans péril. Cette absence de toute voix même pas une seule qui peut apporter une contradiction dans les débats, ne flatte pas la démocratie. La majorité actuelle, le gouvernement et le Président se flattent des élections qui se sont déroulées dans le calme et utilisent ces élections comme argument de preuve d’une démocratie vivante. On peut pourtant s’interroger sur cette démocratie lorsqu’on observe la composition des deux chambres du parlement.

A l’Assemblée Nationale, sur 127 députés, on peut recenser à peine trois d’entre eux que l’on apparente à des opposants, encore qu’ils naviguent souvent avec du mou dans du flou. Par pudeur, ils auraient pu, à la limite, se taire lors de ces sénatoriales plutôt que de porter secours à des candidats Tim qui n’en avaient pas besoin. 123 ou 124 sur 127 députés, 22 sur 22 au Sénat, difficile de penser qu’un tel panel représente fidèlement les tendances de la société. Là se trouve tout le risque de ces élections.

Ces parlementaires ont obtenu légalement la mission de représenter le peuple et, si d’aventure, la population ne partageait pas le sentiment officialisé du peuple, la menace demeure sur un bégaiement de l’histoire et l’on en connaît les ravages.

Afin de sauver la mise contre un tel danger ou peut-être simplement dans le but de sauver la face et obtenir ainsi un délai de grâce, le Président garde la possibilité de procéder à une ouverture qui ne ressemble pas à une simple opération de débauchage, lors de la désignation des 11 sénateurs dont il est l’unique décideur. Mais cette ouverture possède des limites car il est difficile de croire qu’une personnalité ayant la volonté d’assumer de façon pleine et entière une responsabilité de parlementaire accepte un poste dans une assemblée de législateurs quand ce poste reste soumis au chef suprême de l’exécutif qui peut y mettre fin à tout moment.

A l’inverse, la tentation est grande, on aurait un penchant à désigner des fantassins pour former une aile dure et une garde prétorienne corvéable à merci en raison de l’insécurité de ce mandat. Des anciens sénateurs élus sous l’étiquette d’un parti anciennement allié au Président, l’AVI, tentent on ne sait pour quelle raison de faire dans l’angélisme en exprimant l’espoir de réels débats au Sénat, malgré l’appartenance de tous les membres à un même parti. Même dans la chambre précédente où l’opposition détenait la majorité, les anciens sénateurs ne parviennent pas à faire un bilan des actions positives qu’ils ont entreprises durant leur mandat.

Une, deux ou trois lois dans lesquelles ils ont joué à mener un combat d’arrière-garde ne suffisent pas à convaincre sur l’efficacité de cette chambre ni à démontrer le niveau des débats. Il n’est qu’à revenir, pour démontrer la hardiesse des membres, sur l’élection du président du Sénat appartenant à la fraction minoritaire adverse. Rajemison Rakotomaharo n’a pas eu à bousculer la majorité de cette chambre pour arriver au poste de président. Aujourd’hui, il devra davantage jouer des coudes avant d’accéder à cette fonction alors que tous les fauteuils sont occupés par des sénateurs Tim.

Marchandage dans les coulisses, tractation au sein des instances dirigeantes ne constituent pas des débats encore que, pour le dernier mot, l’avis du Président de la République risque d’être décisif. Les débats ne peuvent se réduire à des tractations ou à des manoeuvres carriéristes. Or depuis que l’on est entré dans ce cycle infernal d’élection en élection, les militants de ce parti dont les candidats ont été promis à la victoire, ont habitué l’opinion à des déballages de déchirement comme si leur appartenance n’avait de sens qu’à se battre pour un fauteuil et comme si les débats n’avaient jamais eu droit de cité.

Au parlement, les discussions risquent de prendre le pas sur les débats. Maintenant que tout se base sur les régions, de plus en plus les interventions adopteront un ton régionaliste. Déjà cette tentation régionaliste a été développée lors de la campagne sénatoriale pour faire du gringue aux grands électeurs. Dans cette dérive régionaliste, les sénateurs pourraient oublier que l’Assemblée des sages a une vocation nationale.

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La Ballade des gens heureux...

Dans nombre de régions, le système a organisé des récréations en faveur des grands électeurs qui devaient participer au vote du dimanche 20 avril 2008 à l’occasion des sénatoriales. A l’évidence les privilégiés de cette sollicitude impromptue ne peuvent avouer s’il s’est agit d’invitation obligatoire ou non. La confidentialité autour de cette initiative, la discrétion du départ ont toutefois donné l’impression d’un éloignement honteux d’une mise au vert injustifiée.

Dans la réalité cette entreprise, si elle n’en avait pas le but, a eu pour résultat d’isoler les grands électeurs avant leur passage dans l’isoloir. Sur papier le Tim avait victoire gagnée à l’avance grâce non seulement à l’absence de candidat ayant les moyens de déjouer les combines mais surtout grâce au nombre des électeurs acquis à sa cause.

Ces mises au vert prennent l’air d’une mise en quarantaine en raison de la coïncidence avec la date des élections. Douterait-on de la fidélité des vassaux à qui l’on a fait confiance en les plaçant et en les nourrissant à des postes de privilège et de rente ? Lorsque la méfiance s’installe dans la maison, c’est peut-être le signe d’un ver dans le fruit. Maires et conseillers régionaux qui ont fait l’objet de cette sollicitude ne communiqueront pas de sitôt sur cette sinécure qui a pu prendre des allures de colonie de vacances ou de centre aéré où l’on a lavé les têtes.

Mais par ces initiatives maladroites, les sénatoriales du 20 Avril 2008 risquent de perdre encore du prestige qu’elle avait déjà peu économisé, davantage que ne l’auraient fait les suffrages de quelques brebis égarées. Dans ces régions les responsables ont peut-être retenu comme hypothèse la plus probable, la contamination d’une majorité du troupeau par la gale, et les soins intensifs ont nécessité cette récréation.


LMD n° 103/madatsara.com - 24.04.2008

Mis à jour ( Samedi, 17 Novembre 2012 07:01 )  
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