Hery Rajaonarimampianina, la "Star" du jour avec Bernard Ramanantsoa sur le départ
Palais d’Etat d’Iavoloha, 18 mars 2015. Le Président de la République Hery Rajaonarimampianina a reçu ce jour le Diplôme de Docteur Honoris Causa de la Grande Ecole des Hautes Etudes Commerciales (HEC) des mains de son Directeur Général, Bernard Ramanantsoa (site officiel de la présidence malgache).
Mais avant d’applaudir à tout rompre, permettez-moi de jeter un regard profondément philosophique à partir de citations qui vont certainement refroidir les ardeurs. Même si, selon ce qu’on peut lire sur le site officiel de la présidence de la république de Madagascar, il s’agissait d’ « une cérémonie grandiose, honorée par la présence de plusieurs invités de marque de tous horizons, dont les représentants de la Chambre de Commerce et d’Industrie française, d’éminentes personnalités du monde universitaire et des anciens d’HEC ».
Le grand William Shakespeare (1564-1616) avait déclaré que « La vie est un vaste théâtre où chacun joue son rôle puis s'en va ». Il a même ajouté que « le monde entier est un théâtre, et tous, hommes et femmes, n’en sont que les acteurs. Et notre vie durant nous jouons plusieurs rôles ».
Ce 18 mars 2015, le rôle de François Golblatt, Ambassadeur de France, aura été celui d’un Monsieur Loyal étrange, par rapport à sa récente vision à propos de la gestion des affaires nationales, menée par le régime actuel. Mais François Calay, philosophe, a raison de dire que : « La vie sociale est un grand théâtre. Les fourbes qui jouent le mieux ont même le privilège infâme de pouvoir se jouer de ceux qui recherchent l'honnêteté ». Qu’a donc révélé M. Goldbaltt ?
« Le Diplôme Honoris causa de HEC est une distinction éminente, dont le prestige tient autant à la qualité des personnalités déjà diplômées d’honneur de HEC qu’à la nature et à la renommée de l’institution remettante. Le Président Hery Rajaonarimampianina rejoint maintenant des personnalités de rang international majeur, qui ont façonné au plus haut niveau le monde de la politique étrangère et de l’économie internationale ces dernières décennies, parmi lesquelles un ancien président de la République française, Valéry Giscard d’Estaing, des chanceliers allemands Helmut Kohl et Helmut Schmidt, un président de l’URSS, Mikhaïl Gorbatchev… des présidents de la Commission Européenne, le co-fondateur de Microsoft Bill Gates… ».
Ainsi donc, l’actuel président malgache est tout simplement devenu une étoile (Star en anglais). Cependant, si, selon un auteur anonyme, « certaines étoiles éclairent des illuminés qui éblouissent des lunatiques », Friedrich Nietzsche (1844-1990), lui, a pensé : « que d'hommes se pressent vers la lumière non pas pour voir mieux, mais pour mieux briller ». Espérons.
De son côté, donnant raison à Nietzsche, Bernard Ramanantsoa, Directeur Général de HEC depuis une vingtaine d'années, a fait l’éloge du récipiendaire en retraçant son parcours et ses réalisations et a mentionné « qu’au vu de tous ses accomplissements, le mérite était évident (merci Pascal Chaigneau du CEDS) et la HEC n’a pas hésité à lui décerner ce diplôme de Docteur Honoris Causa ». Bravissimo !
Questionnement du journal « 20 minutes » à propos, justement, de ce « mérite évident », ICI
Dr Jules Etienne
ICI, l'avis du Dr Jules Etienne qui, avec le Dr Kolo Roger, avait laissé sa place de candidat à la présidence à l'expert-comptable (ICI)
Et effectivement, en regard des réalités vraies qui prévalent à Madagascar depuis un an et trois mois, M. Ramanantsoa donne également raison à trois grands penseurs, dans cette vision que la vie est un grand théâtre. D’abord Victor Hugo (1802-1885) : « Le théâtre est une tribune qui doit faire de la pensée le pain de la foule ». Ensuite, Nietzsche, encore : « Le théâtre, ce n’est jamais qu’une manifestation au-dessous de l’art, quelque chose qui s’adapte au goût des masses, lorsqu’on le fausse pour elles ». Enfin, Anatole France (1844-1924): « Il est dans la nature humaine de penser sagement et d'agir d'une façon absurde ».
Pour l’heure, cette histoire d’honoris causa (pour l'honneur de la cause en latin) s’apparente plutôt à la cosa nostra (cette cause qui est la nôtre ou ce qui est à nous en italien), elle-même issue de la Società onorata (honorable société, toujours en italien). Honoris cosa nostra en somme… Une fois le moment d’euphorie passé, il faudra bien revenir aux réalités malgaches. Car la vie continue et ne s’arrêtera qu’à votre mort. Et qui vivra verra.
Les docteurs honoris causa Ravalomanana et Rajaonarimampianina. Le premier d'Imerikasinina, le second d'Antsofinondry. Des bleds, quoi... Score du moment : 3 Ã 1
Mais si nous jetons un regard sur le passé assez récent, le Président Marc Ravalomanana, lui, a obtenu trois fois ce titre de docteur honoris causa. Et ce sont, à peu près et sans les actuels membres du parti Hvm, les mêmes « invités de marque de tous horizons » qui étaient venir l’applaudir. Cela a-t-il empêché sa triste fin ? Cela a-t-il empêché le récipiendaire du jour, Hery Rajaonarimampianina, de l’envoyer à Antsiranana en résidence surveillée, avant de faire ami-ami avec lui, dans une démarche de réconciliation nationale on-ne-peut-plus… théâtrale ? Rien que pour cela, son mérite est « évident », en effet. Eh oui, amis lecteurs : « La vie est un vaste théâtre où chacun joue son rôle puis s'en va ». Bon point pour l’actuel président malgache : on ne l’a pas obligé à s’affubler de la coiffure comme son prédécesseur, dans les photos qui suivent.
Premier titre de docteur « Honoris causa » attribué par l’Université d’Antananarivo, en décembre 2007, au Président de la République Marc Ravalomanana, né le 12 décembre 1949
A l’époque, Jean Eric Rakotoarisoa, vice-président de l’Université d’Antananarivo (actuel Président de la HCC), avait déclaré que « l’attribution de ce titre « Honoris causa » signifie une reconnaissance et distinction pour une personnalité hors du commun qui a apporté ses efforts pour développer le pays et l’enseignement universitaire ». Du grand théâtre, n’est-ce pas ? Car, d’un autre côté, la majorité des enseignants-chercheurs avait condamné le zèle de l’équipe de la présidence de l’Université d’Antananarivo dirigée par le Pr Wilson Rajerison. Pour les universitaires malgaches, ce titre ne peut être conféré qu’à une personnalité étrangère. Ben, Ravalomanana pensait avoir tous les droits, étant « Filoham-pirenena ». Comme Rajaonarimampianina et sa cour, actuellement...
En mai 2008, le président de la République, Marc Ravalomanana, a été consacré docteur « honoris causa » de l’« Abilene Christian University » (Texas-U.S.A.). Ce sera son second titre du genre
Troisième titre « honoris Causa » décerné au Président de la République Marc Ravalomanana, par l’Université de la ville de Beijing, en août 2008. Six mois plus tard (le 17 mars 2009), il s'enfuyait en Afrique australe...
Le Président Hery Rajaonarimampianina battra-t-il le « record » de son prédécesseur, avant d’être oublié et ignoré par tous les spectateurs présents ce 18 mars 2015, au Palais d’Etat d’Iavoloha ? Et, «amin'ny fo tsy miangatra», à quoi lui servira ce titre dans la gestion des affaires de l'Etat délabré, à part l'accrocher bien en évidence dans son salon (d'honneur) ? A se justifier ? Et de quoi ? Car comme l'a émis Odette Calay: « Plus je me justifie, plus j'exprime que je me sens coupable ». Mais il y a sûrement des blanchiments de personnes, comme il y a des blanchiments d'argent. Quel est votre avis?
Au fait, pourquoi la cérémonie ne s’est-elle pas déroulée à la HEC à Paris ? C’est peut-être çà le coup de… théâtre et pour lui éviter de mettre la coiffe et la toge !
Ah, j’allais oublier. Pourquoi Hery Rajaonarimampianina « héroïque » dans le titre de cet article déjà historique ? Parce que, dans le contexte socio-politique dans lequel patauge la Grande île de l’océan Indien, l'héroïsme est la seule manière de devenir célèbre quand on n'a pas de talent. Enfin, un rappel au Héros du jour : « L'homme qui se noie s'accroche à l'eau » (proverbe africain). La cause est, ainsi, entendue.
Jeannot Ramambazafy – 19 mars 2015
LA GAZETTE DE LA GRANDE ILE DU 19 MARS 2015