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Didier Raoult : Mon destin ne dépend pas de ce qu’on pense de moi

Le 27 avril 2020, le célèbre Professeur français Didier Raoult a été interviewé par Bertrand Coulombel, Docteur en sciences cognitives, de  Fondation MAGister. Ce, à propos de fake news et de la pandémie du nouveau coronavirus. Transcription d’extraits qui laissent beaucoup à réfléchir et feront indéniablement réfléchir tout le monde.

« (…) Tous les pays riches et tous les pays développés ont eu des succès beaucoup moins importants que les pays pauvres qui, eux, assez raisonnablement, ont choisi de traiter ça comme par ironie avec des médicaments de malade qui ne coûtaient rien, et qui ont, du coup, des mortalités beaucoup plus faibles, et dans les quinze pays qui ont la plus forte mortalité, c’est-à-dire que les pays riches, c’est-à-dire qu’il y a une déconnexion actuellement entre la richesse et la capacité à répondre à des situations de cet ordre-là.

Vous savez qu'il y avait un restaurant, à Londres, qui n'existait pas, et les farceurs ont commencé à cliquer, cliquer, cliquer, cliquer sur TripAdvisor. Au bout de six mois, c'est devenu le restaurant n°1 de tout Londres ! Cela veut dire qu’on peut faire croire à toute la population londonienne que le meilleur restaurant est simplement le restaurant qui n'existe pas.

Il faut faire attention à l’information et son traitement. Les gens raisonnent toujours simplement parce l'ignorance amène à raisonner de plus en plus simplement, donc on entend beaucoup de choses sur l’ignorance. Cette structure et cette manière de penser n'est pas en adéquation du tout avec une situation de crise dans laquelle les conseillers ne doivent pas être les mêmes qui décident ; ne doivent pas être les mêmes, ne peuvent pas être les mêmes parce la situation est d'une autre nature : réagir vite en prenant des décisions rapides, çà n’est pas le temps habituel auquel nous sommes accoutumés ; c'est un temps de crise comme la guerre et la paix ; c'est deux choses différentes. Vous ne pouvez pas avoir les mêmes qui dirigent les choses et qui prennent les décisions dans les deux situations. C'est la leçon qu'on doit apprendre ici.  Sinon, après la bataille, quand la guerre sera finie, vous commencerez à faire des propositions thérapeutiques.

Le droit à la parole est extrêmement limité, il est très contrôlé encore. C’est le droit d'accéder à l'antenne ou pas, et puis là, d'un coup, explose le droit à la parole de tous. Donc, ce sont les réseaux sociaux et financiers qui, bien entendu, amplifient ce droit à la parole avec les autres médias traditionnels, ce que l’on peut qualifier de fake news qui ne sont pas les news mais que eux propagent. Là, la question c'était : est-ce qu'on doit traiter cette maladie ou est-ce qu'on doit faire des essais ? Nous, on a fait le choix de traiter la maladie. On a eu des réactions d'une violence inouïe, mais on n’avait pas le choix. Si on voulait traiter cette maladie, il fallait prendre ce qui était disponible, ce qui était logique, c’est-à-dire des médicaments qui marchent contre le virus, qui sont les médicaments les plus utilisés du monde, les moins dangereux du monde, et cela a levé des grandes folies de trouver que les médicaments les plus pratiques sur l’humanité sont des médicaments dangereux. On ne sait pas d'où ça sort. L’azithromycine c’est le médicament le plus utilisé comme antibiotique dans les infections respiratoires. Deux médicaments aussi simples (Ndlr : Chloroquine et azithromycine) pour traiter  quelque chose qui est une pandémie, çà tombe sous le sens sauf si on ne veut pas le traiter en attendant d'avoir des essais pour voir si on peut avoir des molécules.

Au fur et à mesure que l’on dit que çà allait marcher ou que ça n'allait pas marcher, il y avait des hauts et des bas qui portent sur des milliards sur un médicament. Donc, la chance que l'on utilise dans une maladie de cette nature-là est extrêmement faible, d’autant que la partie dangereuse de la maladie est une partie qui n’est plus virologique mais qui essentiellement une partie immunologique de réponse de l'autre qui est trop violente et qui explique çà. Donc, il y a une vraie question, là, mais en tout cas, cette cinétique, si elle se confirme, montrera que : ou il fallait commencer à décider de traiter comme une pneumonie avec les médicaments dont on sait qu'ils sont sûrs et qu'ils marchent au laboratoire contre ces virus, ce qui était le bon sens ;  ou on décidait qu’on ne traitait pas, en attendant les résultats d’essais qui arriveront après la bataille. C'est une vraie question…

Et d’ailleurs, il y a eu beaucoup moins de critiques sur l’essai qui a été publié, qui est simplement un traité qui n’est comparé à rien du tout, et qui a été publié dans le New England Journal of Medecine et tout le monde qui a dit : vous voyez çà marche, alors qu'on rapporte 60% d'effets secondaires avec un médicament qui est effectivement très mal toléré. Pour notre part, on a eu des réactions très violentes qui montrent que l’arrivée d’une maladie nouvelle aigüe est quelque chose à quoi l'ensemble des pays riches n'est pas pratique. C’est-à-dire que le temps qu'il faut pour traiter une maladie comme celle-là, est très court. Et si l’on commence à faire des études qui se terminent quand il n'y a plus de maladie, on ne peut pas lutter contre la maladie du tout.

Je pense que c'est lié à un vrai changement social et c’est vrai aussi au niveau de la production scientifique parce qu’il y a des blocs scientifiques, actuellement, qui ont une valeur considérable. De plus en plus, nous mettons nos publications avant les publications, en particulier, des structures de crise, pour faire partager ce que nous avons et qui ont besoin d’être analysées. On ne peut pas perdre trois mois… Vous voyez, dans une situation dans laquelle une épidémie va durer trois mois, vous ne pouvez pas attendre trois mois avant que vos résultats soient publiés, ce n’est pas raisonnable.

Il y a beaucoup de reproches qui sont faits par les gens conservateurs sur le mécanisme de diffusion de l’information, sur le mécanisme de diffusion de la connaissance qui ne sont plus en adéquation avec les moyens actuels. Et çà, c’est un immense changement qui explique aussi beaucoup beaucoup beaucoup d’irritation. Mais nous, le premier papier qu'on a mis sur la chloroquine et l'azithromycine, en pre-print, il a été vu plus de 600.000 fois.  Moi, je peux vous dire que çà correspond globalement au nombre de vues et téléchargements d’un journal habituel sur un an. Ce qui veut dire qu'on est en train de bouleverser complètement l’accès à tous à l’information.

Et d’ailleurs, je reçois beaucoup de gens qui analysent les données disponibles parfois beaucoup plus profondes, beaucoup plus professionnelles que ce que je lis dans des journaux scientifiques. Parce que parmi les gens qui sont confinés, il a de très bons mathématiciens, de très bons statisticiens qui font des analyses extrêmement pertinentes et extrêmement intéressantes. Donc, on voit bien qu’il y a là un changement de modèle à cette occasion-là. Du fait du confinement, les changements de techniques donnent un accès permet aux gens d'avoir  le temps de lire, d'aller fouiller, d'aller trouver des données.

Ici, en France, je suis l'image de ce changement mais il y a les mêmes déchainements aux États-Unis ; il y a les mêmes déchainements; il y a les mêmes déchainements entre des manières de voir qui sont des manières de voir de pays qui sont très riches qui n'ont pas l'habitude d'être confrontés à de nouvelles maladies pour lesquelles il y a des décisions rapides à prendre. Donc, quand on est très riche et qu’on n’a pas grand-chose à espérer de nouvelles médecines, on n’est pas pressé, on a le temps et on a une aversion au risque; on est en principe de précaution et, donc, tout est basé là-dessus : on vit très vieux déjà ; on ne va pas avoir de médicaments qui vont faire gagner dix ans d'espérance de vie, c'est pas vrai.

Concernant les attaques contre moi, beaucoup de gens sont extrêmement gentils et me disent des choses extrêmement gentilles. Les gens qui travaillent ici (Ndlr : l'Institut Hospitalo-Universitaire Méditerranée infection à Marseille) sont couverts de petits cadeaux… Les autres je m'en fiche un peu.  Mon destin ne dépend pas de ce qu'on pense de moi, cela m'est égal. Je vois le bon côté des choses, finalement je découvre des choses que je ne savais pas… ».

Transcription : Jeannot Ramambazafy - Également publié dans "La Gazette de la Grande île" du mercredi 29 avril 2020

Mis à jour ( Mercredi, 29 Avril 2020 13:48 )  
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