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Ranavalona III. Souvenirs de la dernière Reine malagasy décédée le 23 mai 1917

Il y a 103 ans aujourd’hui, 23 mai 2020, la dernière Reine de Madagascar, Ranavalona III, est décédée d’une embolie cardiaque en exil. Beaucoup de personnes ont écrit sur elle, beaucoup d’écrits ont circulé à son propos et les sources sont aussi diverses que diversifiées. Aussi bien du côté des Malagasy que des colons français. Comme les médicaments génériques, tout cela est tombé dans le domaine public. Charge à moi, journaliste d’investigation d’en faire un dossier cohérent avec un thème précis.

Ainsi, ce rappel des 103 ans de la disparition que la Reine Ranavalona III, doit nous rappeler que Madagascar était un état souverain et indépendant envahi par la force des armes par la France. Un rappel qui doit nous rappeler sans cesse qu’en cette année 2020, dans ce monde, ravagé par l’ennemi invisible qu’est le covid-19, la puissance des armes et de l’argent ne signifie plus rien et qu’il est temps qu’Emmanuel Macron cesse d’encore tenter d’accaparer Madagascar et ses Dépendances, avec un dernier sursaut d’orgueil en voulant faire des îles éparses des réserves françaises.

Dans un an, ce Macron ne sera plus au pouvoir en France. Pourquoi perpétuer l’héritage de Gallieni en ces temps de nouvel ordre mondial ? Qu’il ait l’élégance (s’il en a) de Rendre ce qui appartient au peuple malagasy. On verra pour ce qui est de leur gestion. Qui était la dernière reine de Madagascar et comment nous a-t-elle quittés ?

La Reine Ravavalona III était la fille de la princesse Raketaka, elle-même fille du roi Radama 1er et petite-fille du roi Andrianampoinimerina. Son père était Andriantsimianatra, de la lignée d’Ambohimanga et d’Andriantsimianatra, la princesse Razafindrahety est née le 22 novembre 1861 à Amparibe. La dernière souveraine de Madagascar a été couronnée reine le jour de son anniversaire, le 22 novembre 1883, à Mahamasina, sous le nom de Ranavalona Manjaka III.

Madagascar avait été déclaré colonie française à partir du 6 août 1896 par l’Assemblée nationale française. La nuit du 28 février 1897, la Reine et sa famille proche sont arrêtées par surprise par le général Joseph Gallieni, alors gouverneur général, et envoyées en exil à l’île de la Réunion, puis en Algérie.

La destitution

« Le général Gallieni fit dire à la reine qu’elle était désormais « sujet français » et qu’elle devait, en tant que telle, venir présenter ses respects au représentant de la France, ce qu’elle fut contrainte de faire, précédée du drapeau français. Il lui fut interdit de porter le titre de « Reine de Madagascar », que Gallieni remplaça par celui de « Reine des Hova ». Galliéni fit en outre enlever les drapeaux malgaches dans tout le pays ».

Dans l’entourage immédiat de la reine, les exécutions et les déportations se succédèrent : le 15 octobre 1896, le général en chef de l’armée malgache, Rabezandrina Rainandriamanpandry, ainsi que l’oncle de la reine, le prince Ratsimamanga, furent fusillés par un peloton de tirailleurs sénégalais. Par arrêté du 28 février 1897, Gallieni prit l’initiative (apparemment sans en référer au gouvernement français) d’abolir la royauté et publia la proclamation suivante :

« Au peuple d’Emyrne (Ndlr : nom français de l’Imerina). Depuis que le gouvernement de la république a déclaré Madagascar colonie française, la royauté est devenue inutile en Emyrne. J’ai donc invité la reine à résigner ses fonctions et, sur sa demande, je l’ai autorisée à se rendre à l’Ile de La Réunion, où elle recevra l’hospitalité la plus large des autorités françaises ».

En réalité, c’est par surprise que la reine dans la nuit du 27 au 28 février 1897, apprit sa destitution et son exil.Alfred Durand, administrateur des colonies, a relaté les dernières heures de la reine dans son palais, ainsi que son long voyage d’exil jusqu’au port de Tamatave, puis de Tamatave au port de la Pointe-des-Galets à La Réunion. Mandaté par le général Gallieni pour accompagner la reine, l’administrateur se présenta au palais à minuit. La reine pleurait. Il lui donna le bras jusqu’au perron et l’aida à monter dans la chaise à porteur. Le départ eut lieu en pleine nuit, à une heure et demie du matin. La reine, sa famille, sa suite, les porteurs et l’escorte formaient un convoi de plus de sept cents personnes.

Ranavalona III eut l’occasion d’aller en France, durant son exil. Ci-après des extraits parus dans « L’Avenir d’Arcachon » N° 2535 du 07juillet 1901. Ils démontrent qu’elle avait été traitée comme la Reine qu’il a été.

Ranavalo à Arcachon (extraits journaux)

1901 : Elle est là

Le 27 Juin la reine fut reçue à l’Hôtel de Ville de Paris et le 28 Juin elle a été reçue par le Président de la République, Emile Loubet et son épouse. Le 29 juin, ce fut le départ pour Arcachon. Elle est arrivée dimanche 30 juin à Bordeaux, gare St-Jean, par l’express de sept heures quatre du matin. Ranavalo est descendue au Terminus où elle a pris un léger repas ; puis, à sept heures cinquante-sept, elle est remontée en wagon et est partie pour Arcachon avec sa suite. Quelques curieux étaient sur le quai.

Elle est partie

L’événement saillant de la saison estivale arcachonnaise, a été la visite de l’ex-reine de Madagascar. Cette dernière avait entre toutes les villes d’eaux françaises, choisi Arcachon comme séjour, pour les vacances que le Gouvernement lui offrait. Nous nous faisons un plaisir de reproduire la poésie, qui lui fut adressée, à cette époque, pour une œuvre enfantine de l’École maternelle Engrémy :

Salut, Ranavalo ! Salut gentille Reine !
Le soleil d’Arcachon, comme à Madagascar,
Fait briller sur tes traits ta Majesté sereine
Semant de diamants ta robe de brocart.

Nous aimons ta tournure et ta grâce onduleuse,
Ta noire chevelure et tes yeux noirs moqueurs,
Ton sourire d’enfant, ta taille harmonieuse,
Ton air affable et doux qui gagne tous les cœurs.

Tu trouveras chez nous la terre hospitalière,
Où toute âme grandit en pleine liberté.
Du palais somptueux et de l’humble chaumière
S’envole en chant d’amour ce cri : Fraternité !

Va ! Ne regrette rien. Sois à jamais Française !
Adopte les couleurs de notre cher drapeau.
Aime notre pays, car tout chagrin s’apaise ;
Le sceptre pour la femme est un bien lourd fardeau.

A toi, donc, les vertus qui donnent la vaillance !
Si tu veux d’heureux jours, au destin soumets-toi.
Et Reine par la grâce et par la bienveillance,
Tu verras tous les cœurs se soumettre à ta loi.

Du chaleureux accueil que l’on te fit en France
Garde, comme un joyau, le charmant souvenir.
Si notre sympathie adoucit ta souffrance,
$Sois une sœur pour nous, espère en l’avenir !

Souviens-toi quelquefois d’Arcachon la charmeuse,
Notre désir serait, nous t’en faisons l’aveu,
De te garder longtemps, aimable visiteuse,
Et de mettre en ton cœur un coin de son ciel bleu.

Une Arcachonnaise.

(« Avenir d’Arcachon » N° 2548 du 06/10/1901)

Ranavalona III à Paris

Exilée à Alger, Ranavalona III, la dernière reine de Madagascar, connut une grande souplesse dans son traitement, de la part du gouvernement français, après le départ de la Grande île du général gouverneur Joseph Gallieni. Depuis longtemps déjà, Ranavalona III rêvait de visiter Paris et la France. Après plusieurs requêtes infructueuses auprès des autorités françaises, elle obtint enfin, au bout de deux ans, en 1901, l’autorisation de se rendre en France. Ainsi, la reine a pu effectuer huit voyages dans l’Hexagone, le premier en 1901 et le dernier en 1915, durant la guerre.

C’est ainsi que Ranavalona III fit la traversée à bord du « Général Chanzy » de la Compagnie Transatlantique et débarqua à Marseille le 29 mai 1901. Elle était accompagnée de sa tante, la princesse Ramasindrazana, de sa nièce, la petite orpheline Marie-Louise née à La Réunion, de sa dame de compagnie, Mme Delpeux, et d’une femme de chambre.

Un jeune étudiant malgache, M. Ranaivo, qui terminait ses études de médecine, fut affecté à la reine comme interprète. À Paris, en juin 1901 la reine séjourna dans un appartement près des Champs-Élysées. Elle visita notamment le grand Palais, le Petit Palais et Notre-Dame de Paris. Elle visita également le château de Versailles.

Ci-dessus également, des photos du magazine « Fémina » de Novembre 1905 au sujet du séjour de la reine "Ranavalo" à Paris en 1905 avec sa nièce la Princesse Marie-Louise

Ultime séjour à Alger

 

C’est un certain Eric Boulogne qui nous relate les derniers jours de la Reine Ravalona III. « La dernière reine de Madagascar décède d’une embolie le 23 mai 1917 à Alger, à l’âge de 56 ans. Elle est alors inhumée au cimetière Saint-Eugène à Alger. Ce n’est que le 23 septembre 1938 que ses cendres sont exhumées pour être rapatriées à Madagascar, sur décision du Ministre des Colonies, Georges Mandel ».

« Le 23 septembre 1938, les restes de la reine furent exhumés et acheminés au port de Tamatave, par le bateau « Ville de Reims ». Le bateau entre dans le port de la Grande île et qu’un train spécial transporte son cercueil de Toamasina vers le tombeau des reines, au Palais de Manjakamiadana à Antananarivo le 30 octobre 1938. Ranavalona III, dernière reine de Madagascar, repose désormais dans le tombeau des reines, à l’intérieur du Manjakamiadana ».

Joseph Gallieni nommé Maréchal à titre posthume, le 7 mai 1921, était, quant à lui, déjà décédé le 27 Mai 1916 à Versailles. Drôle de mois de mai en ces années 1916, 1917, 1921, ne croyez-vous pas ?


Dans quelques mois, Manjakamadiana et le Palais de la Reine seront de nouveaux accessibles au public avec une touche de modernité comme ce colisée (amphithéâtre) qui servira à donner des spectacles « Son & Lumière » de représentations de l’Histoire de Madagascar. Mais les esprits rétrogrades n’y ont jamais pensé. Comme le roi Louis XVI n’aurait jamais pensé que le château de Versailles possèderait, un jour, des ascenseurs modernes et des tas de caméras de surveillance. Qu’ils meurent tous donc idiots si cela leur plaît, mais nous nous vivrons avec notre temps !

Pour ces sinistres imbéciles à l'esprit rétrograde, deux photos de la Pyramide de verre de Pei (un Chinois), dans la cour du Louvre à Paris : avant et après. No comment !

Dossier de Jeannot Ramambazafy -Également publié dans "La Gazette de la Grande île" du samedi 23 mai 2020


Mis à jour ( Samedi, 23 Mai 2020 05:17 )  
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